Logo de Sources d'Asie
les spécificités de la Malaisie
 
 
Guy Shulders
Université Paris I
Groupe de Travail Vietnam
(juin 1997)
 
 
Chef de l'État 
Jaafar Abdul Rahman
Premier Ministre
Mahatir Mohamad
Population 
20,6 mns h
Capitale  
 Kuala Lumpur
Monnaie
Monnaie ringgit (2,06 F)
R/h
 
 
L'une des économies émergentes les plus dynamiques de la planète paraît avoir besoin de souffler un peu, et de nombreux experts jugent souhaitable un ralentissement de la croissance en 1997. Le taux d'expansion -9,5% en 1995-, devait se situer autour de 8,2% en 1996 et 8% de croissance sont prévus en 1997. Les dépenses budgétaires pour 1997 seront inférieures de 1,2%à celles de 1996.
Au pouvoir depuis 1981 et reconduit en 1996, par acclamation et pour trois ans, à la présidence du parti au pouvoir, le premier ministre Mahathir Mohamad n'affiche toutefois aucune intention d'abandonner les grands projets d'infrastructure mis en chantier. Leur coût s'élève à une vingtaine de milliards de dollars au moins, drainant les ressources de l'État et encourageant le risque de surchauffe. La première tranche -complexes sportifs, nouvel aéroport international, transports urbains- doit être achevée à temps pour l'accueil, en 1998, des jeux du Commonwealth.
En outre, la volonté affirmée d'accéder en 2020 au statut d'économie complètement industrialisée s'est concrétisée par l'adoption, en mai, d'un septième plan quinquennal de développement d'un montant de 216 milliards de dollars. Ce plan, dont la priorité est de renforcer les industries de haute technologie, se fonde sur une croissance annuelle moyenne de 8% jusqu'à la fin du siècle. La Malaisie veut éviter de se retrouver dans la situation de la Thaïlande, où le retard accumulé dans la réalisation d'indispensables infrastructures constitue aujourd'hui un sérieux handicap.
Si, en 1996, la balance commerciale s'est nettement redressée au cours des huit premiers mois, laissant espérer un surplus en fin d'année, le déficit de la balance des paiements courants s'est maintenu (plus de 7 milliards de dollars prévus, soit plus de 8% du PNB). Le marché du travail a continué de se resserrer, avec un taux de chômage inférieur à3% en dépit de l'accueil de plusieurs centaines de milliers de travailleurs immigrés. Dans le secteur industriel, le relèvement annuel des salaires, supérieur à 10%, a dépassé les gains de productivité.

·  une situation économique exceptionnellement rapide
·  un État fort qui organise le développement économique
 

1995
population (mns h)
19,5
superficie (km2)
  330.434
PNB 1995 (mds $)
81*
PNB/h ($) nominalPNB PPA ($)
3930*8763$
croissance du PIB 1995(moyenne 1992->1995)
8,3%8,4%
balance des paiements courants (mds $)
—8,9
réserves en devises (mns $)
24500
dette extérieure totale (mns $)
28500
taux de couverture exports/imports
 103%
exportations (mns US $)
68,9
importations (mns US $)
72,8
dette extérieure/export de b&s
42%
service dette / export b&s 
 6%
taux d'inflation 
4,3%
source : MOCI, Commerce Mondial en 1996 et Asiaweek 19/7/96 (*) Asiaweek 19 juillet 1996
 
 
I- La situation économique de la Malaisie

1· Richesses naturelles
- A la fin des années cinquante la Malaisie était un pays de mines et de plantations où le chômage sévissait de matière endémique.
- Quatre décennies plus tard, le niveau de vie, mesuré en terme de parité de pouvoir d'achat, a rejoint celui de la Grèce et la pénurie de main d'oeuvre est devenue la contrainte majeure de ce "Nouveau pays Industriel".
- Cette croissance s'est faite dans un environnement politique stable. Le Premier Ministre, Mohammed Mahatir a l'ambition d'amener la Malaisie dans les rangs des pays industrialisés d'ici 2020.

- A la fin des années soixante dix, grâce à l'envolée des cours des matières premières la Malaisie avait les moyens de financer les projets ambitieux proposés par le ministre de l'Industrie, Mohammed Mahatir, futur Premier Ministre : entrer dans l'industrie lourde et la construction automobile et abandonner les industries labor intensives.
- Le Premier Ministre a demandé à ces concitoyens de s'inspirer des modèles japonais ou coréen. La Corée avait en outre l'avantage d'être un NPI qui n'était pas peuplé de Chinois. Les mots d'ordre : "Look East Policy", "Malaisie Inc" visaient à promouvoir plus de discipline dans le travail, plus de consensus dans les relations sociales et une meilleure coopération entre l'Etat et les milieux d'affaires.

2· croissance et investissement
- Entre 1987 et 1994, la croissance économique a été en moyenne de 8 %.
- La reprise des investissements et le dynamisme des exportations ont tiré la croissance et permis d'enclencher un cercle vertueux avec la reprise de la consommation privée.
- L'industrie a été le moteur de la croissance et la plupart des secteurs industriels ont contribué à ses performances: la reprise a ainsi élargi les débouchés des "éléphants blancs" (ciment, sidérurgie et construction automobile).
- La Malaisie est l'économie la plus dynamique de l'ASEAN et les principaux indicateurs macro-économiques sont équilibrés.
- Le déficit du solde courant (3,4% du PIB en 1993) est financé par de fortes entrées de capitaux (les réserves de changes sont équivalentes à 8 mois d'importations).
- Les tensions sur le marché du travail sont la principale contrainte. Le taux de chômage est très faible (3,8%) et les pénuries de main d'oeuvre concernent tout à la fois les emplois qualifiés et non qualifiés.
- Les plantations emploient ainsi de façon illégale quelques 300.000 Indonésiens.
 

II- Le rôle de l'Etat dans la croissance économique
de la Malaisie
La politique industrielle de la Malaisie peut être analysée en empruntant la grille de lecture proposée pour l'Etat Japonais :
- État programmateur,
- État protecteur,
- État promoteur et
- État producteur.

1· État programmateur
- Il y a deux types de pays, ceux qui sont capables d'élaborer des stratégies à long terme et les autres. La Malaisie fat partie de la première catégorie.
- Bien qu'ayant hérité d'une tradition libérale, l'Etat a une pratique de planification indicative assez élaborée ;
- L'Etat a adopté la technique de "la Salle de Contrôle" (Operating room) élaborée par les Britanniques à partir de 1948 (et jusqu'en 1960) pour suivre les progrès de la lutte contre le terrorisme .
- La "National Operations Room" a accès à toutes les informations relatives à la mise en oeuvre du plan, et elle est relayée au niveau régional par le "State and district operations room". Les plans sont indicatifs et révisables.
- A l'occasion des "Mid Term Review", le gouvernement a démontré qu'il était tout à fait capable de négocier des virages pour s'adapter aux évolutions de la conjoncture.

2· État protecteur
- A l'exception de Singapour, les pays de l'ANSEA ont pratiqué des politiques d'import-substitution qui les ont amenés à ériger des barrières protectionnistes parfois dissuasives.
- Ces protections ont subsisté alors même que les politiques industrielles s'orientaient vers la promotion des exportations.
- La Malaisie a opéré sa transition vers la promotion des exportations sans mettre en oeuvre une réforme douanière.
- Il n'y a pas eu véritablement transition d'une stratégie vers une autre mais coexistence entre deux stratégies et deux catégories d'entreprises, les exportatrices, qui jouissent d'une franchise douanière, et les autres, qui jusqu'à présent entretiennent peu de relations avec les précédentes.

3· État producteur
- En dépit de sa tradition libérale, la Malaisie est le pays du Sud Est asiatique où le poids économique de l'Etat a été le plus élevé mais, du fait de cette tradition, c'est également celui qui met en oeuvre le programme le plus ambitieux de privatisations.
- Le poids de l'Etat dans l'économie, mesuré à travers le rapport budget sur PNB, a considérablement augmenté dans les années soixante dix pour atteindre 40% un taux sans équivalent en Asie.
- Cette évolution traduit la multiplication des entreprises d'Etat. Pour mettre en oeuvre la NEP, les State Economic Development Corporation (SEDC) des divers État ont créé des entreprises publiques ou se sont engagés dans des joint ventures.
- On recensait 22 Non Financial Public entreprises dans les années soixante, elles étalent 253 à la fin des années soixante dix et 354 en 1985, à la veille du lancement du programme de privatisation dont 110 dans les services, 77 dans l'industrie et 58 dans la construction.
- Inversement, les projets étalent conçus pour le marché national mis, en dépit de projections de la demande très optimistes (et critiquées dès cette époque), les capacités étaient en deçà des seuils admis pour bénéficier d'une compétitivité internationale. Entrées en production en pleine récession, ces projets sont apparus comme autant d"'éléphants blancs".
- Prenant acte de ces difficultés il a lancé à partir de 1986 le programme de privatisation le plus ambitieux du Sud Est asiatique et qui a le plus de chance d'être réalisé car le marché financier malaysien est le plus développé de la région.
- Au cours des quatre dernières années 22 entreprises d'Etat ont été privatisées ; le quart du capital de Telekom Malaisie a été introduit en Bourse ; les "State Economic Development Corp" ont été débarrassées d'une centaine de petites entreprises.
- Parallèlement l'Etat s'est engagé dans une dizaine d'opérations de BOT (build operate and transfer) dont la plus importante est la construction de l'autoroute Nord Sud confiée à UEM.
- L'Etat demeure l'actionnaire principal des entreprises jugées "stratégiques et la participation de capitaux étrangers est limitée à 25%. La privatisation apparaît a posteriori comme une composante de la NEP et peut s'analyser comme le transfert d'une propriété publique appartenant à l'ensemble des Malaysiens aux seuls "Bumiputeras" représentés par une société liée au parti politique UNMO.

4· Look East Policy et Malaisie Inc ?
Dans un mémorandum adressé aux hauts fonctionnaires le Premier Ministre Mahatir précisait ce qu'il entendait par "Look East Policy" et "Malaisie Inc" :
1- Look East Policy veut inculquer l'esprit de diligence et de discipline au travail caractéristique des pays de l'Est asiatique, de même que la loyauté envers l'entreprise et la nation.
L'accent est placé sur la productivité, la qualité, le rapprochement entre les échelons de la hiérarchie, la concentration sur des objectifs à long terme.
2- Le concept de "Malaisie Inc" doit être défini comme celui d'une coopération entre le gouvernement et le secteur privé pour que ce dernier réussisse et contribue ainsi davantage au développement national.
En fait, les antagonismes ethniques qui caractérisent la Malaisie rendent à priori difficile l'adoption de ce type de modèle élaboré dans des pays caractérisés par une très forte homogénéité ethnique.
 

 En savoir plus, demander un mot de passe, collaborer au  site, cliquer ici : Sources d'Asie
Mise à jour : 9 décembre 1997              Retour à la page d'accueil